“jimny” by alexandre bavard

Alexandre Bavard is based in Paris, France and is a Alumni of École nationale supérieure des beaux-arts de Lyon. Alexandre Bavard can be seen as a playwright, and performer, all in one. His work expands from fine art sculpture, prints, and paintings into video, music and dance. Bavard creates various worlds influenced by his Georgian roots, science fiction, and for the need of escapism and discovery.

Bavard is interested in creating a visual language, a form of expression that transcends any specific medium, and is fueled by repetition, movement, and flow. His broad range of works are tied by the theme of a post-urban world, meaningful artifacts of a past utopia that its significance has long been lost and repurposed asrarity and artifact. Bavard has titled this series, Neo-ARchologia, which refers to his process of casting the shape or transferring the impression of these found artifacts into sculptures and prints.

Pablo de Pinho


Que reste-t-il de nous à l’aube de nos oublis ? Où commence la fin ? Où se dissimule le début ? Le travail d’Alexandre Bavard déjoue les temporalités. Il se faufile entre les vestiges d’un avenir chimérique et l’espérance d’un passé mythifié. Il décline les formes et les supports, échappant au temps, mais aussi aux espaces, et même à la géographie. D’où vient-il ? Un reste de pneu, un t-shirt logoté ou un costume folklorique constituent-ils des indices ou des énigmes ? Et si l’enjeu de son œuvre était précisément de ne rien résoudre, de ne pas questionner mais de laisser libre cours au vertige des interprétations.

Qu’il s’agisse, entre autres, de Transfr, de Neo-k, ou de Neo-archeologia, l’étonnement est le même. Celui qui contemple se retrouve dans l’impossibilité d’appréhender l’univers dressé sous ses yeux. Les formes, les couleurs, les images, sont des propositions d’intensités qui nous conviennent ou non, qui nous traversent ou pas, mais qui s’ouvrent là, devant nous, sans rien à comprendre, ni à dialectiser. C’est encore plus saisissant dans ses performances. Assister à Bulky n’exige aucune attention spéciale, aucun respect spécifique, aucune compréhension particulière, vérifiable, évaluable, mais de manière plus pertinente encore, il s’agit juste, d’être là, de se risquer à ressentir, de laisser le courant électrique se déployer en nous. D’être dans l’ivresse d’une spiritualité qui nous précède, nous dépasse. Ce n’est pas un art sage, érudit, mais bien un art, qui crée un dehors, tel que l’envisageait Gilles Deleuze, un autre monde.

Mais peut-être qu’une autre interrogation émerge à travers ces précieuses errances. C’est la question de l’identité auquel il faut faire face. Lorsque la langue bégaie, lorsque les tons s’emmêlent, lorsque les signaux se brouillent, que devenons-nous ? Est-il toujours possible de dire « je » ? Les règles ne s’appliquent plus et l’identité devient une recherche qui prend parfois l’allure d’un combat, d’une guerre à traverser. Les mouvements se saccadent, l’habit devient armure, les pièces se brisent, son art s’affiche comme le lieu d’une disruption générale de l’être, nous laissant perplexe et donc fasciné. Ou mieux, fasciné parce que perplexe. C’est le cas de la série ARMVR, ou tout semble concourir vers la même idée, celle qu’il faut réapprendre, réorienter ce que l’on croit savoir, considérer les objets, les tissus, les matières autrement, accepter de nouvelles conséquences, et si elles sont improbables, c’est tant mieux. Fourrure, crochet, laine, plâtre ou métal ? Ou se cache la solidité ? Tout vaut. Tout est radical. Alexandre utilise l’art pour sortir de l’art, sortir de soi, sortir des normes, sortir du temps, sortir de l’espace. Et voir, ce qu’il y a au dehors, et de quelle façon ce dehors nous transforme. Explorer, déconstruire, creuser son être au point que l’étrange devienne le familier.

Alors à l’aune de ces intensités électriques, émerge la révolte, provoquant un Short Circuit. Ses pièces ne sont pas à décrire, ce ne sont pas des spectres de catalogue, ce sont des audaces, des équivoques, des altérités, des différences. Alexandre Bavard nous propose ce monde à venir. Un monde au visage inattendu. Que reste-t-il de nous à l’aube de nos oublis ? L’amplitude d’une intensité qui se laisse conquérir.

Marie Robert